Qu’il nous apparaisse comme un choix naturel et évident ou non, l’allaitement maternel est souvent source d’interrogations voire d’angoisses pour les futures (et jeunes) mamans. Entre vrais doutes et fausses croyances, on fait le point sur le sujet avec la complicité de Véronique Darmangeat, consultante en lactation et notamment auteure de la très complète Bible de l’allaitement*.
Allaiter abîme les seins
C’est faux ! C’est la grossesse (et les changements hormonaux rapides qu’elle induit), les fluctuations de poids et l’âge qui abîment les seins. Allaiter n’entraînera pas davantage de vergetures que la grossesse. Hydrater et masser la peau très régulièrement peut aider à limiter l’apparition de ces marques jugées disgracieuses – qui, d’ailleurs, souvent, s’estompent voire disparaissent totalement quelques mois après l’accouchement ou la fin de l’allaitement.
Une femme dotée d’une petite poitrine ou particulièrement mince produira moins (voire pas du tout) de lait
C’est faux également. La quantité de lait produite n’est pas liée à la taille des seins ou à notre IMC… Moins de 2% des femmes seulement ne produisent pas ou très peu de lait. Il s’agit de cas pathologiques tels que l’hypoplasie.
Allaiter est le plus souvent douloureux pour la maman
Le temps de la mise en route et au moment de la montée de lait, les seins peuvent en effet être inconfortables voire douloureux, mais c’est loin d’être systématique. Et les crevasses sont tout sauf une fatalité. Elles sont le plus souvent liées à la position de tétée du bébé qui n’ouvre pas suffisamment la bouche ou ne place pas sa langue comme il le faudrait.
Allaiter fait maigrir
C’est vrai… À condition d’allaiter longtemps, au moins plus de 6 mois. En-deçà, on consomme certes un peu plus de calories que si l’on n’allaite pas, mais pas suffisamment pour engendrer une consommation supplémentaire des graisses stockées.
Certains aliments favorisent la lactation ou permettent de la ralentir
Ce n’est pas toujours vrai. Certains aliments tels que le persil sont réputés pour couper la lactation… À condition d’en manger deux bouquets par jours ! À l’opposé, le fénugrec, souvent conseillé pour augmenter la lactation, peut, chez certaines femmes, produire l’effet escompté, à condition d’être consommé sous forme concentrée.
Les tisanes d’allaitement sont généralement peu efficaces lorsqu’on ne produit pas assez de lait. Mais tendent en revanche à augmenter la lactation des femmes qui en produisent déjà beaucoup… Attention à la bière sans alcool, réputée elle aussi pour augmenter la lactation : non seulement cela ne fonctionne pas chez toutes les mamans, mais la plupart des marques contiennent des traces d’alcool.
D’une manière générale, l’alimentation n’a donc qu’un effet très limité sur la production de lait. En revanche, la position du bébé lorsqu’il tète et donc sa manière de drainer le sein sont fondamentales pour améliorer la production de lait.
Les bébés allaités sont moins malades que les autres
De nombreuses études tendent en effet à le prouver. Bien sûr, certains enfants allaités sont souvent malades et d’autres, nourris exclusivement au lait maternisé, ne le sont quasiment jamais. En revanche, on sait que le colostrum en particulier et le lait maternel en général fournissent au bébé des anticorps qui le protègent notamment de certaines infections ORL pendant la durée de l’allaitement, et l’aident à constituer une flore intestinale riche et protectrice qui lui sera utile pour la suite.
Les bébés nourris au sein tètent plus souvent car le lait est moins nourrissant
C’est faux ! Aucun aliment ne semble meilleur pour un bébé que le lait de sa maman. Si un bébé ne prend pas suffisamment de poids alors qu’il est allaité, ce n’est pas parce que le lait n’est pas assez riche mais parce qu’il ne tire pas suffisamment de lait ou ne tète pas suffisamment souvent. Revoir la position du bébé pourra l’aider à tirer davantage de lait et lui proposer le sein plus régulièrement résoudra le plus souvent le problème. Si un bébé dort beaucoup dans les premiers jours de sa vie, il peut être judicieux de le placer tout près de sa mère (idéalement en peau à peau) afin de stimuler son envie de téter.
L’estomac d’un bébé à la naissance est contracté (il n’excède pas la volume d’une noisette) et le lait maternel se digère facilement et rapidement. Cela explique le besoin de téter plus fréquent d’un bébé allaité.
Une maman qui allaite ne peut s’éloigner de son bébé très longtemps
C’est faux. Assez rapidement, une jeune maman peut tirer son lait et le conserver afin qu’il soit donné plus tard au biberon, par le papa ou à la crèche par exemple. Le lait se conserve même plusieurs mois au congélateur, sans perdre de ses bienfaits. Si la composition du lait évolue en fonction des besoins de l’enfant, un bébé d’un an peut boire le lait tiré par sa maman 6 mois plus tôt : il restera toujours plus intéressant nutritionnellement pour lui que le lait artificiel.
Le stress lié à la vie quotidienne et à la reprise du travail par exemple peut entraîner une chute de la lactation
Ce n’est pas tout à fait exact. Un stress fort peut nuire au réflexe d’éjection du lait, qui, par ricochet entraînera une moindre production du lait.
Sein ou biberon, il faut choisir dès le départ !
Certes, il n’est pas conseillé de donner le biberon à un bébé allaité les premières semaines, car il risque de confondre les deux et de ne plus téter comme il faut : pour le sein, le bébé doit en effet tirer la langue en avant et créer un vide dans sa bouche, tandis qu’au biberon, il n’aura qu’à appuyer avec sa langue sur la tétine pour faire sortir le lait. Certains bébés n’arriveront pas à gérer les deux, d’autres s’en sortiront parfaitement, il n’y a pas de règle. Seule certitude : pour lancer et installer la lactation, il est nécessaire que le bébé tète souvent ou que le lait soit tiré de manière régulière.
*Ma Bible de l’allaitement, de Véronique Darmangeat, aux éditions LEDUC.S Pratique
Véronique Darmangeat est par ailleurs fondatrice de l’association Lactisima et du Centre Allaiter à Paris.
Pour aller plus loin sur le sujet, nous conseillons également la lecture de L’Allaitement, du Dr Marie Thirion, aux éditions Albin Michel, et le site de la Leche League.