Avant l’arrivée du bébé et parfois même avant la grossesse, on pense déjà au prénom que l’on donnera à son enfant. Les listes pour filles et garçons se multiplient, tout comme les discussions avec le papa autour de la signification, de la sonorité et de l’originalité du choix. Quel est l’enjeu du prénom ? Pourquoi suscite-t-il tant de passions ? François Bonifaix, psychanalyste et auteur du Traumatisme du prénom (éd. Dune), nous éclaire.
Résumer en un mot son projet
Contrairement aux générations précédentes, l’arrivée d’un enfant de nos jours se pense et se prépare bien à l’avance. Le choix du prénom, pour François Bonifaix, serait ainsi la façon de « résumer en un mot un projet qu’on a pour la chair de sa chair. Il y a ce désir d’enfant commun dans lequel on va projeter son propre fantasme, parce que bien souvent, faire un enfant c’est donner du sens à sa propre existence. » Ce serait donc le poids socio-culturel de notre propre histoire qui rentrerait en ligne de compte dans le prénom que l’on choisit pour son enfant. L’étymologie ou l’alliance de sonorité avec le nom de famille seraient simplement « des points de vérification. Ce qui détermine le choix d’un prénom c’est le mode de fonctionnement des parents. Finalement ça doit être un mix entre papa et maman, l’enfant est bien la fusion des deux, le prénom doit être le fruit de cet amour. Il faut qu’il corresponde aux deux. »
Quand l’enfant donne son avis
On a beau se préparer, faire des listes à l’avance -qui seraient, pour François Bonifaix une manière de se « projeter avec son compagnon sur un amour infini ensemble »- adorer pendant des années Margaux ou Augustin et se jurer qu’on appellera un jour son bébé comme cela, il arrive qu’au cours de la grossesse, on ait soudainement envie d’autres prénoms. « En général la maman a toujours le dernier mot, précise François Bonifaix. Il faut dire que le papa doit mettre un nom sur quelque chose qu’il ne voit pas et ne ressent pas, qui n’existe pas encore pour lui. Parfois, la mère a des idées de prénoms sans savoir d’où ça lui vient. C’est l’enfant qui, d’une certaine façon, donne son avis dans le ventre de sa maman. Ça dépasse parfois notre entendement. »
L’influence des modes
Même de manière inconsciente, nous sommes influencés par les modes de prénoms. Année après année, on regarde ceux qui ont été les plus donnés et on a tendance soit à s’en rapprocher, soit à vouloir s’en éloigner à tout prix. François Bonifaix rappelle qu’il faut surtout essayer de s’écouter, pour donner un nom qui représente parfaitement ce que l’on souhaite pour lui: « Je pense que les gens devraient davantage écouter leur instinct. Il ne faut pas oublier que c’est l’enfant qui va porter ce prénom. » Le spécialiste souligne notamment les dérives de prénoms originaux mais difficiles à assumer, à l’instar de Nutella ou Fraise récemment interdits: « La volonté d’avoir un prénom unique est dangereuse, parce que si vous avez un prénom trop original, vous allez devoir répondre à cette originalité, et être différent pour un enfant signifie être mis de côté. »
Préférer les prénoms « hommage » en deuxième ou troisième position
Souvent, la tentation est forte de donner à son enfant le prénom d’un aïeul qu’on adorait ou de quelqu’un qui nous a marqué dans le passé. Pourtant, ce choix n’est pas anodin selon François Bonifaix : « Le risque est de prendre à quelqu’un son histoire et de la coller sur le dos de son enfant. Mais c’est aussi la problématique de cette personne qu’on lui impose. Même si c’est positif, parce que le grand-père était très brillant par exemple, c’est un fardeau pour l’enfant parce qu’il se mettra la pression pour être à sa hauteur. » Le prénom hommage peut alors être donné en deuxième ou troisième position : « C’est génial les prénoms à rallonge, s’enthousiasme François Bonifaix. Si on n’arrive pas à résumer son projet en un prénom, on en met plusieurs, ça ouvre une porte à l’enfant, une possibilité pour lui de prendre un autre prénom qui fera tout autant partie de son identité. »
Tiphaine Lévy-Frébault.
Photo : Pinterest.
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