Lorsque l’entrée à l’école se profile, le compte à rebours commence pour les parents sur l’épineux sujet de la propreté. Pot, couches-culottes, petites récompenses… Pour certains enfants, la transition vers les toilettes et les journées sans couches se fera spontanément et au moment voulu, pour d’autres, toutes les stratégies n’y feront rien tant qu’ils ne seront pas prêts. On a demandé à Maelys Le Levreur, éducatrice de jeunes enfants, éducatrice Montessori et directrice de crèche de nous aider à aborder cette étape de la propreté en toute sérénité.
Comment rendre propre son enfant quand les premières tentatives ne donnent rien ?
Pour cette fameuse entrée à l’école on demande à nos enfants d’être propres et même parfois d’abandonner doudou et tétine… Mais qu’est-ce que ce lieu étrange et effrayant que l’école alors pour lui ? Est-ce pour cela que l’on doit devenir propre ou parce qu’on est prêt physiologiquement et psychiquement ? La propreté est-elle une acquisition ou une obligation due au calendrier scolaire ? Comment ne pas être apeuré face à tant d’impératifs ?
Bien sûr en tant que parents, nous nous nous mettons la pression mais est-ce une raison pour la transférer à notre enfant ? Une chose est sûre, plus nous le « forcerons », moins ça marchera ! Le développement de l’enfant n’a rien à voir avec ce que la directrice de l’école a dit à la visite de pré-rentrée. En effet, pour être propre, il faut avoir acquis le contrôle de ses sphincters. Il faut sentir que ses organes sont pleins, et avoir le contrôle de ses muscles, et une bonne maîtrise motrice. Alors, on respire, on souffle et au lieu de devenir des sergents de la propreté, on observe où en est son enfant.
On nous dit que cela vient comme un déclic, mais comment favoriser ce déclic ?
Si physiquement et psychiquement, votre enfant est prêt, cela peut être rapide (au moins la propreté diurne, la propreté nocturne étant acquise plus tard). Quel que soit l’accompagnement et dans toutes les cultures, cette acquisition arrive entre 2,5 ans et 3 ans.
L’observation est votre meilleure alliée. Sa couche reste sèche quelques heures ? Il vient vous voir quand sa couche est pleine ? Il a un « intérêt » pour le pot ou les toilettes ? Il sait exprimer ses envies (je veux de l’eau) ? Il se déshabille seul ? Bonne nouvelle, il y est presque et vous allez enfin pouvoir lui mettre les magnifiques culottes achetées il y a 6 mois.
À vous, pour favoriser le déclic, ou au moins l’accompagner, de lui proposer le pot ou les toilettes de manière discrète.
Prenez le temps d’en parler avec lui, dites-lui que vous allez aux toilettes et expliquez-lui ce que c’est le pipi et ce que sont les selles. Et oui, pour certains enfants, il n’est pas si facile que ça de se « séparer » d’une partie de soi. Alors on explique : « Notre corps ne garde que ce qui est bon pour lui et, pour le reste il le rejette, le pipi, les crottes de nez et les selles, c’est ça, donc on peut les laisser partir de notre corps ».
Quel est le bon moment ?
Beaucoup de parents voulaient que je fasse un article ou un live sur ce sujet pendant le confinement parce que « ils avaient le temps » mais on oublie alors le temps de l’enfant, son développement. C’est un petit être à part entière, qui a des envies, des désirs et un développement différent de celui du voisin.
Le bon moment, c’est donc quand on le sent prêt, qu’il n’y a pas d’autres grands changements dans sa vie (naissance, déménagement…) et que notre machine à laver est opérationnelle ! Bien sûr l’été est idéal car on porte moins de vêtements et la vie en culotte ou maillot de bain facilite les choses. Mais votre enfant pourra aussi montrer les signes le 12 février avec sa combinaison de ski, à vous de comprendre les signes et de l’accompagner. Un enfant qui est « prêt » sera propre en quelques jours.
Comment les inciter sans les braquer ?
À partir du moment où vous commencerez, bannissez les salopettes, les bodys ou autres vêtements nécessitant votre intervention, et pensez à laisser la porte des toilettes ouverte.
Vous pouvez lui proposer le pot, par exemple avant de changer la couche ou avant le bain, mais ne le laissez pas des heures dessus et ne le forcez pas s’il n’en a pas envie, sinon votre enfant va penser que c’est vous qui gérez l’ouverture ou la fermeture de ses sphincters et il risque de se retenir à des moments où il ne devrait pas.
C’est son corps, ses besoins, ses intestins, ne l’oubliez pas. Il faut qu’il comprenne cette sensation et qu’il y réponde en allant sur le pot ! Vous pouvez aussi acheter un pot pour sa poupée ou son doudou, vous verrez, souvent, Doudou ira avant votre enfant.
Quelles sont les choses à ne pas faire ou à ne pas dire ?
On oublie le chantage au cadeau, les bonbons, etc. On ne fait pas pipi pour avoir un Playmobil, par contre comme toute acquisition, on peut féliciter son enfant, faire une danse de la joie, acheter les culottes Pat’Patrouille ou Reine des Neiges pour marquer le passage entre les couches et les culottes, mais pas plus.
Pas besoin non plus de lui proposer un camion ou un livre pour « l’accompagner » aux toilettes, il doit se concentrer sur ce qui se passe dans sa vessie, non sur la vitesse du camion.
On évite bien entendu les réprimandes et les « tu es sale, tu es cracra, tu sens mauvais », bref, tout ce qui va le rabaisser.
Et, surtout, on ne met pas la photo de son enfant sur le pot sur les réseaux sociaux. La pudeur et l’intimité, chez l’enfant comme chez l’adulte, sont des choses importantes à respecter et cela dès la naissance.
D’ailleurs, au début de la propreté, beaucoup d’enfants vont se cacher pour faire une selle. Alors, non, on ne met pas le pot au milieu du salon (ni la table à langer d’ailleurs) et on ne s’extasie pas à 5 sur le premier pipi !
Faut-il procéder par étapes ?
Les enfants deviennent propres d’abord en journée, puis, généralement, quelque mois plus tard, la propreté nocturne arrive. Vous pouvez donc, après plusieurs jours où la couche est sèche, lui proposer de passer à une culotte ou un slip en tissu.
À partir de ce moment-là, n’oubliez pas de lui proposer plusieurs fois le pot.
N’oubliez pas que cette sensation est nouvelle pour lui et il ne sait pas toujours comment y répondre.
Il est aussi difficile pour lui parfois de s’arrêter de jouer, c’est alors votre rôle de lui proposer assez souvent, au moins au début, le pot, et s’il vous dit non, faites-lui confiance.
S’il a plusieurs accidents et qu’il ressent le besoin de remettre une couche un jour, pas de souci.
Plusieurs mois plus tard, si vous voyez que la couche est sèche après la nuit, vous pourrez lui proposer de la retirer le soir.
Faut-il préférer le pot ou les toilettes de grands ?
L’avantage du pot pour l’enfant est la stabilité. Faire pipi les jambes dans le vide, ce n’est pas très agréable !
Donc je conseille d’opter d’abord pour le pot et ensuite pour le réducteur et le petit banc pour qu’il puisse poser ses pieds. Laissez-le passer seul du pot aux toilettes, il le fera quand il se sentira prêt.
Comment demander à la nounou ou à la crèche de nous aider ?
Vous êtes les premiers éducateurs de vos enfants, à vous donc d’initier et de demander à la crèche ou à la nounou de suivre ce que vous faites à la maison. Attention à donner plusieurs changes, il y aura sans doute plus d’oublis là-bas car l’enfant est pris dans plein d’activités et doit aussi trouver, dans ce lieu, comment faire et à qui demander lorsqu’une une envie pressante se présente.
Que faire en cas de régression ?
Grandir, c’est aussi renoncer. Renoncer parfois aux soins de papa et maman, cela peut être difficile, alors de temps en temps, on régresse, surtout à l’arrivée d’un petit frère ou d’une petite sœur, on veut remettre une couche et reprendre un biberon. Et oui parfois autonomie rime avec un sentiment de délaissement de papa et maman ! Cette petite phase passera vite avec l’aide de vos mots qui lui montreront les avantages à être grand.
Pour finir, faites-lui confiance, l’acquisition de la maîtrise des sphincters fait partie du développement moteur de l’enfant comme l’acquisition de la marche, alors, regardez-le, écoutez-le et laissez de côté les commentaires de l’entourage souvent nombreux sur ce sujet.
Des livres à conseiller ?
Des livres sur la propreté, il y en a plein, et pour moi, les meilleurs sont ceux qui utilisent finesse et humour :
J’y vais de Matthieu Maudet, L’Ecole des Loisirs
Vitede Gwendoline Raisson, L’Ecole des Loisirs
Occupé de Mattheu Maudet, L’Ecole des Loisirs
Mon imagier du corpsdans la collection Kididoc Nathan
Y’a rien de Benoit Charlat, Casterman
Et pour finir, un best-seller La petite taupe qui voulait savoir qui lui avait fait sur la têtede Werner Holzwarth, chez Milan Jeunesse.
Maelys Le Levreur accompagne les jeunes et futurs parents personnellement et lors de conférences ou de permanences parentalité au sein des entreprises. Plus d’infos sur son site My Little Coaching et sur son compte Instagram @mylittlecoaching
Crédit photo : Belly Balloon Photography/ Les Louves. Vêtements : Absorba.