On la connaît notamment pour ses dessins hilarants qui illustrent le ELLE depuis près de quinze ans. Dans la vraie vie, Soledad Bravi, maman de deux grandes filles, est aussi amusante et percutante que ses personnages. Elle nous livre avec beaucoup d’autodérision et de franc-parler ses confidences de maman qui a vu ses oisillons quitter le nid, et réapprend à vivre sa vie de femme…
J’étais impatiente de rencontrer celle qui n’a pas son pareil pour croquer les petits instants du quotidien, et qui nous fait immanquablement rire avec ses dessins naïfs et subtils, qui retracent avec humour nos petits travers féminins. Dans ma bibliothèque depuis deux ans, je collectionne aussi ses ouvrages pour enfants, drôles, intelligents et qui ravissent ma fille à chaque lecture. En les parcourant et en observant comme ils font mouche à chaque fois auprès des petits lecteurs, on comprend immédiatement que Soledad Bravi est maman. Elle a en effet deux filles, de 22 et 20 ans, Margot et Lili, qui vivent aujourd’hui à New York, et qui ont été baignées par les dessins de leur mère depuis leur plus tendre enfance. « Il y a des enfants qui réclament à leur maman des gâteaux au chocolat, moi c’était des dessins », confie l’illustratrice en riant.
« Qu’est-ce que je fous dans une entreprise alors que mon bébé est à la maison ? »
Le dessin et Soledad, c’est une vieille histoire : « Ma mère était illustratrice pour enfants, alors le soir en rentrant de l’école avec mes frères, on ne faisait pas les devoirs mais des dessins : du coup j’étais nulle en classe mais bonne en loisirs créatifs ! », raconte-t-elle. Logiquement, elle décide de faire des études d’arts graphiques à Penninghen et décroche un premier boulot dans une agence de publicité après son diplôme. « C’est là que j’ai appris le principe du concept », se souvient-elle, et c’est aussi accessoirement là qu’elle rencontre son futur mari… À la naissance de leur première fille, elle décide de tout plaquer et de se consacrer à l’illustration. « En retournant au boulot, je me suis dit : mais qu’est-ce que je fous dans une entreprise alors que mon bébé est à la maison ? Le soir je suis rentrée et ai annoncé à mon mari que je voulais me lancer ! ».
Elle prend alors son carton à dessins sous le bras et va frapper aux portes des médias. C’est finalement le Figaro Madame qui la remarque, avant qu’elle ne soit recrutée en 2000 par le ELLE pour collaborer avec Sophie Fontanel à la création du personnage Fonelle, désopilante illustration de la jeune femme contemporaine dans toutes ses contradictions. Aujourd’hui, elle jongle entre sa bande-dessinée hebdomadaire publiée en dernière page du ELLE et ses livres pour enfants, dont certains sont devenus des best-sellers (Le livre des cris, en tête de gondole depuis dix ans). « Quand je bosse sur l’âge 0-3 ans, je fais certes le livre pour qu’il plaise aux tout-petits mais je fais surtout en sorte que ce soit drôle pour les parents. Je sais à quel point ça peut être dur de trouver le temps et l’énergie pour lire une histoire à ses enfants après une journée de travail, surtout quand on relit le même livre des dizaines de fois d’affilée ! Donc je me dis que si j’arrive à les faire rire, c’est déjà ça de pris ! ».
« Quand l’aînée est partie de la maison, je me suis pris une immense claque »
Chez elle, les histoires du soir n’ont plus cours depuis de nombreuses années : aujourd’hui, ses filles vivent de l’autre côté de l’Atlantique, et Soledad apprend à jongler entre sa vie de maman à distance et son nouveau quotidien dans une maison sans enfants. « Quand l’aînée est partie, je me suis pris une immense claque. Le côté « je suis ta maman » protecteur, affectif, qui m’a nourrie pendant dix-huit ans disparaît, on fait une croix sur presque vingt ans d’une relation de tous les jours, de toutes les minutes, où même la nuit on est disponible pour se réveiller si besoin… C’est un vrai deuil à faire, j’ai pleuré trois mois quand Margot est partie ! ». Toujours avec autant de franchise et d’humour, elle continue : « et puis pendant ce temps, on n’a pas pensé à son âge, c’est comme si on s’était arrêtée à ses 28 ans, quand notre premier enfant est né. Le jour où Margot est partie, j’ai pris 18 ans dans les dents ! ». La bonne nouvelle, c’est qu’elle a aussi retrouvé son mari. « Alors oui, on se demande si on va s’entendre avec son mari de 50 ans comme avec son amoureux d’il y a 18 ans… Et la réponse est que vous retombez amoureuse de votre mari, vous créez un nouvel équilibre à deux ». Désormais, celle qui savoure sa nouvelle liberté retrouve ses filles pour les vacances, fait régulièrement des allers-retours à New York pour leur rendre visite, et profite de sa maison enfin calme pour des week-ends « glande sur canapé »… Le bonheur, en somme.
M.R.
Crédit photos : Sophie Derrien
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