En France, pour une majorité de jeunes mamans, le congé maternité dure 16 semaines (34 semaines pour des jumeaux, 26 semaines pour un troisième enfant). Pour certaines, confier son bébé de 3 mois à peine à une assistante maternelle ou une crèche est douloureux, voire inenvisageable. Congé parental, sabbatique, sans solde, temps partiel ou télétravail : quelles sont les options lorsqu’on souhaite prendre plus de temps avec son nouveau-né après la naissance ? On fait le point avec Tiphaine Mayolle, auteure et consultante en parentalité et équilibre des vies en entreprise*.
Savoir ce que l’on veut
Le moment du retour au travail après un congé maternité est une étape délicate, parfois mal vécue par les jeunes mamans. Pour mieux préparer et anticiper ce retour, Tiphaine Mayolle, auteure et conférencière spécialiste des questions de parentalité en entreprise conseille de commencer par un travail sur soi : « l’arrivée d’un enfant est toujours propice à de nouveaux questionnements et une nouvelle organisation, y compris au sein de son entreprise. C’est l’occasion de s’interroger sur ses objectifs et ses valeurs. Quel est mon moteur ? Quel est mon idéal ? C’est en fonction de cet idéal qu’on peut faire des choix et les défendre auprès de son employeur ».
S’informer sur la politique familiale de l’entreprise
Les entreprises n’ont pas toutes la même attitude face à la parentalité. Certaines se contentent de respecter la loi, d’autres vont plus loin avec des congés plus longs, des congés spécifiques (congé allaitement, congé PMA, congé solidarité) ou des services pour les jeunes parents (berceau d’entreprise, garde d’enfant). « Le collaborateur n’a pas seulement un rôle passif lorsqu’il devient parent : il a la responsabilité de s’informer par le biais des documents disponibles, des conventions collectives et en communiquant avec son manager ou son service RH », précise Tiphaine Mayolle.
Imaginer des solutions avec son manager
Au moment de parler avec son manager ou son responsable RH, « soyez transparent et ouvert, conseille Tiphaine. J’insiste sur la posture parce que cela change tout : se montrer compréhensif avec son manager, avoir conscience des contraintes de l’entreprise sera beaucoup plus constructif pour trouver une solution satisfaisante des deux côtés », ajoute Tiphaine, qui précise que la période est plus que jamais propice à ce genre de discussions sur la conciliation des vies : « ce n’est plus blanc ou noir, temps plein ou congé parental, il est possible d’imaginer des transitions plus douces et des solutions sur-mesure dans de nombreuses entreprises », pense-t-elle.
Les solutions pour prolonger son congé maternité :
Le congé parental d’éducation
Il est ouvert à tout salarié (père ou mère) ayant au moins 1 an d’ancienneté dans l’entreprise lors de la naissance de son enfant ou de l’arrivée dans le foyer en cas d’adoption. Il ne peut pas être refusé par l’employeur à moins d’un refus motivé et justifié. Pendant la période du congé parental, le contrat de travail est suspendu, le salarié ne peut exercer un autre emploi, mais il peut effectuer un bilan de compétences. À la fin du congé, le salarié retrouve son précédent emploi ou bien un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente.
Combien de temps peut durer le congé parental ? Sa durée initiale est de 1 an, renouvelable deux fois. Il doit prendre fin au plus tard le jour des 3 ans de l’enfant ou à la date de son entrée à l’école.
Comment le demander ? Si le congé parental débute immédiatement après le congé de maternité ou d’adoption, le salarié doit en informer l’employeur au moins 1 mois avant le terme de ce congé. En cas de prolongation ou de modification, il faut en avertir l’employeur au moins 1 mois avant le terme initialement prévu.
La rémunération durant le congé parental : le salarié n’est pas rémunéré par son employeur pour la période non travaillée (sauf dispositions conventionnelles ou collectives contraires). Il peut percevoir l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant (Paje) de la part de la Caf, sous conditions de ressources. En complément de cette allocation, le salarié peut percevoir la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE).
Plus d’infos : service-public.fr
Le congé sabbatique
Le congé sabbatique est un congé pour convenance personnelle et donc soumis à l’approbation de l’employeur. Pour en faire la demande le salarié doit justifier de 6 années d’activité professionnelle et d’au moins 36 mois d’ancienneté dans l’entreprise. Durant le congé sabbatique, le contrat de travail est suspendu, le salarié peut exercer une autre activité professionnelle, salariée ou non, en respectant les obligations de loyauté et de non-concurrence vis-à-vis de son employeur. À la fin du congé, le salarié retrouve son emploi ou un emploi similaire dans l’entreprise et perçoit une rémunération au moins équivalente à celle qu’il percevait au moment du départ en congé.
Combien de temps dure un congé sabbatique ? Entre 6 et 11 mois, sauf accord ou convention collective spécifique.
Comment demander un congé sabbatique ? Le salarié doit faire sa demande au moins 3 mois avant la date de départ envisagée. L’employeur doit répondre (accord, refus ou report de date) dans un délai de 30 jours.
La rémunération durant le congé sabbatique : le salarié n’est pas rémunéré durant le congé sabbatique, mais il peut le financer par une partie de ses congés payés.
Plus d’infos : service-public.fr
Le congé sans solde
Comme le congé sabbatique, il s’agit d’un congé pour convenance personnelle mais qui n’est pas encadré par la législation. L’employeur n’a pas d’obligation légale de l’accorder. Le contrat de travail est suspendu durant le congé, le salarié est libre d’exercer toute autre activité sauf clause de non-concurrence. À l’issue du congé, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire.
Durée du congé sans solde : la durée de ce congé fait l’objet d’une discussion entre l’employeur et le salarié.
Rémunération pendant le congé sans solde : La rémunération n’est pas maintenue, toutefois, le congé sans solde peut être rémunéré dans le cadre du compte épargne-temps (CET), sous conditions.
Les solutions pour reprendre le travail en douceur :
Le congé parental à temps partiel
Il s’agit d’une autre modalité du congé parental, qui permet au salarié de reprendre le travail à temps partiel après la naissance ou l’arrivée d’un enfant dans le foyer. Le salarié peut choisir la durée du travail qui lui convient (16 heures par semaine minimum), en revanche la répartition des horaires doit être fixée en accord avec l’employeur.
Le passage à temps partiel
Le passage à temps partiel fait l’objet d’une discussion entre le salarié et son employeur afin de préciser les modalités d’organisation et de se mettre d’accord sur les nouveaux horaires souhaités. Le passage à temps partiel doit faire l’objet d’un avenant au contrat de travail.
Il existe deux formes de temps partiel :
1/ une réduction hebdomadaire du temps de travail : (par exemple, passer de 35 heures par semaine à 27 heures par semaine).
2/ une réduction de la durée du travail sous forme d’une ou plusieurs périodes non travaillées d’au moins une semaine. Par exemple : 8 semaines dans l’année pour s’occuper de ses enfants pendant une grande partie des vacances scolaires. En dehors de ces périodes, le travail s’effectue à temps plein. L’employeur peut refuser cette demande à condition de justifier de raisons objectives liées aux nécessités du fonctionnement de l’entreprise. S’il l’accepte, un avenant au contrat de travail doit être signé. Celui-ci précise la ou les périodes non travaillées et peut également prévoir les modalités de calcul de la rémunération mensualisée indépendamment de l’horaire réel du mois (« lissage » des rémunérations).
Comment demander un passage à temps partiel ? Un accord collectif d’entreprise ou un accord de branche étendu peut prévoir les modalités et la procédure à suivre. En l’absence de dispositions conventionnelles, le salarié doit, au moins 6 mois avant la date envisagée de passage à temps partiel, adresser un courrier recommandé avec AR à son employeur lui précisant la durée de travail souhaitée ainsi que la date souhaitée de début de ce nouvel horaire.
Plus d’infos : travail-emploi.gouv.fr
Passer le relais grâce au congé paternité
Parce qu’il est beaucoup moins difficile de reprendre le chemin du bureau quand on sait que notre tout-petit reste au chaud avec son papa ou son deuxième parent, on peut désormais profiter du nouveau congé paternité de 28 jours pour rendre la transition plus sereine juste après le congé maternité, et retarder de quelques semaines l’entrée en crèche ou chez l’assistante maternelle.
Plus d’infos sur le nouveau congé paternité : service-public.fr
D’autres astuces et solutions plus personnalisées peuvent-être envisagées pour aménager le temps de travail d’un salarié au moment de son retour de congé maternité ou paternité :
- Le télétravail régulier ou ponctuel.
- Le retour au travail progressif : c’est un avantage mis en place dans certaines entreprises, qui permet de reprendre à mi-temps sur une période donnée (15 jours-1 mois) tout en étant payé en temps plein, pour faciliter la période de transition et d’adaptation avec le mode de garde.
- Le congé allaitement : certaines entreprises proposent à leurs salariées de prolonger leur congé maternité pour faciliter leur allaitement grâce à un congé rémunéré à 100%. Pour connaître les dispositions légales concernant l’allaitement et la reprise du travail, lire notre article.
- Poser des jours de congé à la suite de son congé maternité/paternité.
- La future maman, si elle se sent bien, peut décider de commencer son congé prénatal plus tard, et profiter ainsi du report des semaines après la naissance.
Et si l’on est travailleur indépendant ou entrepreneur ?
Depuis le 1er janvier 2019, les travailleuses indépendantes (artisans, commerçants, professions libérales) affiliées au Régime général de la Sécurité Sociale bénéficient d’un congé maternité d’une durée minimale de 8 semaines répartis en un congé prénatal de 2 semaines (avant la naissance) et un congé postnatal de 6 semaines. La durée maximale de ce congé peut être de 16 semaines, c’est-à-dire une durée identique à celle d’une femme salariée.
Ce congé est indemnisé par l’Assurance Maladie sous la forme :
1/ d’une allocation forfaitaire de repos maternel : versée pour moitié au début du congé, et pour moitié à la fin de la période obligatoire des 8 semaines. Au 1er janvier 2021, le montant de cette allocation forfaitaire s’élève à 3428 euros.
2/ d’indemnités journalières forfaitaires : versées pour chaque jour de cessation d’activité à condition de cesser cette activité pendant un minimum de 8 semaines. Leur montant est calculé en fonction des revenus cotisés transmis à l’Urssaf. Au 1er janvier 2021, il ne peut être supérieur à 56,35 euros par jour.
Le congé parental pour les travailleurs indépendants et les micro-entrepreneurs
Les travailleurs indépendants ou micro-entrepreneurs affiliés au Régime général de la Sécurité Sociale peuvent bénéficier d’un congé parental et prétendre au versement d’une allocation par la Caf (Paje et PreParE). Il impose de cesser totalement (mise en sommeil de la société) ou partiellement son activité.
*Merci à Tiphaine Mayolle, auteure du livre « La parentalité en entreprise expliquée à mon boss » (éditions Kawa), elle collabore également à la création du label national « Family Friendly Company », pour les entreprises qui soutiennent la parentalité avec l’association Ensemble pour l’éducation de la petite enfance et le Ministère des Solidarités et de la Santé.
Crédit photo : Belly Balloon Photography / Stokke / Les Louves