Jusque dans les années 1950 le bébé a été perçu comme un tube digestif, dénué de sensations et d’émotions. Le pédiatre américain Thomas Brazelton fut l’un des premiers à le dire : « le bébé est une personne ». Et oui, un nouveau-né est un individu à part entière… On le sait aujourd’hui, le tout-petit vient au monde déjà doté de grandes capacités. Il ne fait pas que manger, dormir ou pleurer : il est doué d’extraordinaires potentiels qu’il développe dès sa vie utérine, lui permettant de naître puis de s’adapter au monde. Alors, quels sens se développent in utero ? Comment peut-il s’adapter à la vie aérienne ? À quoi servent les réflexes archaïques du nouveau-né ? Quelles sont ses facultés dans les premières semaines de vie ? Pour mieux comprendre nos bébés, voici quelques éclairages sur leurs incroyables compétences.
Comment se développent les cinq sens in utero ?
À la naissance, le nouveau-né n’arrive pas de nulle part. Pendant les neufs mois de gestation, il se prépare à sa vie extra-utérine sur le plan physique et relationnel. À travers ses sens, il entre déjà en relation avec le monde qui l’entoure. Vers la huitième semaine de grossesse, le toucher est la première expérience sensorielle vécue par le fœtus au contact du liquide amniotique, de la paroi utérine, des caresses sur votre ventre. Le nez du bébé sera formé vers la septième semaine de grossesse et l’odorat apparaît vers dix semaines. Le goût apparaît vers la onzième semaine de grossesse : à travers le liquide amniotique et grâce à ce que vous mangez, le bébé découvre les saveurs, avec une préférence pour le sucré ! Vers 22 semaines de grossesse, votre bébé fait l’expérience de l’audition. Il entend tout d’abord les bruits internes de votre corps via le liquide amniotique, comme les battements de votre cœur, puis les bruits extérieurs comme votre voix ! L’intérêt de parler à son bébé avant qu’il soit né prend ici tout son sens. Enfin, la vue est le dernier sens à se développer in utero : votre bébé pourra percevoir la lumière, mais c’est à sa naissance que sa vue se développera davantage.
Quelles sont les compétences du nouveau-né pour s’adapter à la vie aérienne ?
Pour venir au monde, le nouveau-né doit déployer des moyens considérables ! Et si à la naissance on lui permet de venir le plus naturellement possible, il sait quoi faire. Il doit fournir un immense travail pour devenir autonome au niveau respiratoire, cardio-vasculaire, pour réguler sa température, pour s’alimenter. Il doit également mettre en place des mécanismes de sécurité :
– Pour éviter l’anoxie (diminution de la quantité d’oxygène) en régulant son rythme cardiaque et en augmentant le nombre de globules rouges qui transportent l’oxygène.
– Pour éviter l’hypothermie : grâce au vernix (substance blanche pâteuse qui recouvre le corps du bébé), au peau à peau et au colostrum du lait maternel, riche en protéines.
– Pour éviter les infections : grâce au colostrum et au peau à peau avec son parent.
– Pour éviter l’hypoglycémie : grâce au liquide amniotique sucré présent dans l’estomac, puis en tétant au sein ou au biberon.
À quoi servent les réflexes archaïques ?
Les réflexes archaïques apparaissent dès la vie fœtale. À sa naissance, la maturité neurologique du nouveau-né est inachevée. Ces mouvements automatiques et involontaires montrent que son système nerveux fonctionne bien. Il en existe sept :
– La marche automatique : oui votre nouveau-né marche lorsque le médecin lui fait faire quelques pas ! Ce réflexe disparaît vers 6 semaines et réapparaît vers 12 mois.
– Le grasping : il se manifeste par un agrippement de la main ou du pied de votre bébé à votre doigt. Il traduit le besoin du nouveau-né de s’attacher à vous.
– Le moro : il se manifeste par un sursaut des bras et des jambes du bébé. C’est une sensation angoissante pour le bébé, qui peut être diminuée par l’emmaillotage.
– La succion – déglutition : c’est le réflexe inné vital, qui permet au tout-petit de téter dès ses premières minutes de vie !
– Les points cardinaux : ils se manifestent lorsqu’on caresse le coin de la bouche du bébé. Il tourne sa tête vers la stimulation, en général vers le sein ou le biberon.
– Le tonus du cou : en s’assurant que le bébé peut maintenir sa tête quelques secondes, on vérifie que le tonus de son cou et de son dos sont bons.
– L’extension croisée : cela permet de vérifier que votre bébé réagit lorsque le médecin vient le stimuler en caressant sa plante des pieds
Créer du lien, la première compétence du nouveau-né ?
Le fœtus crée du lien dès sa vie utérine. Ce lien se renforce quand le nouveau-né, à la naissance, va s’attacher à ses parents. Marie Thirion l’écrit dans son livre Les compétences du nouveau-né : « sa compétence c’est d’obtenir que ses besoins fondamentaux soient assurés, besoins physiologiques, besoins de tendresse et besoin de relation. » Créer du lien est vital. Ses sens participent à cela :
– Grâce au toucher par le peau à peau, le nouveau-né va pouvoir réguler sa température, sa respiration et sa glycémie. Il va pouvoir tisser des liens avec ses parents, car être contenu dans leurs bras va le rassurer, diminuer son stress et ses pleurs. Cela stimule également sa succion et l’allaitement.
– Grâce à son odorat, le nouveau-né va retrouver l’odeur du liquide amniotique sur ses mains et sur le sein de sa mère. Cette odeur rassurante, connue lors de sa vie utérine, lui permet également de créer l’attachement avec ses parents.
– Le goût aura également un effet rassurant pour le tout-petit. Les saveurs du lait maternel sont comparables à celles connues dans le liquide amniotique, avec toujours une préférence pour le sucré !
– Grâce à son ouïe développée in utero, le nouveau-né reconnaîtra dès sa naissance les voix rassurantes de ses parents. Retrouver le bruit du battement du cœur de sa mère en étant en peau à peau ou en écharpe sera aussi très réconfortant.
– Dès sa naissance, la vue permet au bébé de fixer le regard de sa mère. Il pourra ainsi apprendre à reconnaître son visage dès ses premières heures de vie. Le premier regard permet l’attachement. À sa naissance, le nouveau-né perçoit jusqu’à 20cm.
Observer votre nouveau-né est essentiel. Ses mouvements, ses expressions, ses regards, son toucher, ses réactions, sont autant de manifestations pour vous raconter qui il est. Cela permet de mieuxle comprendre, de répondre à ses besoins, et de vous sentir petit à petit plus confiants dans votre rôle de parent. Observer votre bébé permet de créer un lien avec lui, de l’encourager et de s’émerveiller. En grandissant votre bébé va déployer de nouvelles compétences relationnelles, motrices, alimentaires, émotionnelles, pour communiquer… Enfin, il est important de ne pas comparer les bébés entre eux. Chacun va à son rythme, avec sa personnalité et son caractère. Les bébés ont encore tant de choses à nous apprendre, continuons de les regarder déployer tous leurs potentiels !
Retrouvez Stéphanie de Boüard, puéricultrice et accompagnante périnatale, sur son site www.stephanieperinatalite.fr
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