Abonnement Netflix, fil WhatsApp ininterrompu, achats compulsifs en ligne et ouverture d’une boutique sur Vinted, comment la grossesse et la maternité ont fait de moi une droguée des écrans…
Ça a débuté très tôt. Peut-être dès les premiers jours quand j’ai cherché une appli ou un podcast de méditation pour m’aider à supporter le premier trimestre de ma grossesse (irritabilité, fatigue, impression de gueule de bois permanente en plein sevrage d’alcool…).
Lorsque les premières insomnies sont arrivées, je me suis mise à remplir compulsivement des paniers sur quelques applis pas choisies au hasard (Zara, Smallable et Amazon pour ne pas les citer). Au bout de ma fatigue à 5h du matin, il m’est même arrivé d’en valider certains. Résultat, j’ai un peu creusé le découvert (mais après tout je ne bois plus et ne fume plus, j’économise…) et fait beaucoup d’erreurs (une paire de bottes rouges importables et un manteau bleu que j’avais vu noir sur mon écran…).
En congé maternité, j’ai définitivement plongé en faisant entrer le loup dans la bergerie : je « nous » ai abonnés à Netflix…
J’avoue que le futur papa a été heureux de plonger avec moi.
Voilà, en quelques mois la grossesse avait fait de moi une caricature de mon époque. Et ça ne s’est pas arrêté là.
Je dois avouer que j’ai eu du mal à lâcher mon téléphone en salle d’accouchement. Je me souviens avoir pensé : « STOP. Ce moment-là je le vis et je le garde pour nous. » J’ai quand même noté quelques phrases en notes que je ne voulais pas oublier (« prendre une péri la prochaine fois »). Heureusement les contractions sont là pour vous ramener dans l’ici et maintenant et j’aurais été bien incapable de tenir mon téléphone ou de regarder mon écran jusqu’au bout, trop occupée à broyer les mains de mon mari pendant qu’un train me passait sur le corps…
À la maternité, comment résister aux 73 sms reçus, tous adorables et remplis de cœurs et de sourires, l’envie d’y répondre, de prendre et d’envoyer des photos, d’ouvrir une notif ici ou là, d’aller checker Instagram… C’est reparti.
Nos téléphones nous ont donné le don d’ubiquité. Le fantasme de pouvoir être à deux endroits en même temps, voire plus, est devenu réalité :
– entretenir 4 ou 5 discussions simultanément sur Whats’app (le groupe famille, le groupe belle-famille, les copines du Jeudi, les copines de Paris, sous-groupes pour le prochain week-end entre potes et autre groupe pour le cadeau d’anniversaire de Maman…),
– faire mes menus et mes courses en ligne en regardant Workin Mums,
– revendre tout et n’importe quoi (et quelques cadeaux de naissance ratés) sur Vinted en pliant le linge,
– zoner sur Pinterest en donnant le biberon,
– éplucher les carottes en écoutant un bon podcast,
– commander un tapis de baignoire antidérapant sur Amazon en surveillant les enfants qui prennent leur bain…
Rien à dire, c’est très pratique et cela comble notre besoin (hyper féminin ?) de faire mille choses en même temps. On a l’impression d’optimiser chaque minute et on finit par calculer et reprogrammer tout ce qui peut être fait en version mobile.
Exemple : les menus de la semaine et la liste de courses, je les dicte à mon téléphone en marchant jusqu’au métro…
C’est infini. Et au gré des progrès de ces petites merveilles, on trouve tous les jours et à chaque minute une nouvelle raison de dégainer son téléphone (d’ailleurs ça fait longtemps qu’on ne prend plus la peine de le ranger dans notre sac), d’autant plus quand on est une toute jeune maman qui voit sa charge mentale multipliée par 3 à la naissance de son enfant…
Mais finalement, vivre 3 journées en une, ne plus prendre le temps de faire une chose à la fois, ne plus avoir à faire de choix et à prioriser puisqu’on a la sensation enivrante et dangereuse de pouvoir TOUT faire : et si c’était ça notre erreur ?
Ce sentiment trompeur de toute-puissance est vite balayé lorsqu’un bébé s’invite dans l’équation. Ces petits bouts ont l’art de nous rappeler les priorités : ce qu’ils veulent vraiment, ce n’est pas seulement le biberon ou les bras, mais une présence sincère et du temps de qualité… C’est ce que j’ai réalisé en plein congé maternité : déconnecter devenait une priorité pour me permettre de me connecter à mon bébé.
J’ai compris que mon temps de cerveau disponible était limité, et que trop de sollicitations étaient loin de soulager ma charge mentale ; que donner le biberon en ne faisant que ça me faisait plus de bien (à moi mais aussi à lui, le bébé) que si j’essayais de suivre une série ou passer une commande en même temps. J’ai retrouvé le plaisir de compartimenter et de remettre au lendemain…
Réapprendre à procrastiner parce qu’on ne peut pas tout faire dans une journée, épurer sa liste d’applications comme on vide ses placards et se sevrer des écrans pour réduire notre charge mentale : et si c’était ça la clef pour être moins stressée ?