Le sommeil fait partie des apprentissages essentiels de nos tout-petits et chacun acquiert cette compétence à son rythme. Un mois, trois mois, six mois ou plus… Le chemin peut être long avant des nuits sereines et les rechutes d’autant plus difficiles à vivre pour les jeunes parents. Pourtant, ces régressions du sommeil font elles aussi partie du chemin vers l’autonomie. On a demandé à Marie, consultante spécialiste du sommeil de l’enfant, de décrypter pour nous ces phases de régression : quand peuvent-elles survenir et comment les gérer ?
Quels sont les âges ou les périodes les plus délicates pour le sommeil de l’enfant ?
Les deux premières années sont particulièrement sensibles : beaucoup de choses peuvent se passer. Dès lors qu’une nouvelle acquisition se met en place (marche, parole), le sommeil peut en pâtir : trop de choses se passent dans le cerveau de notre bébé, il mobilise de nombreuses ressources si bien qu’il ne peut pas tout gérer, cela peut donc provoquer plus de réveils nocturnes ou des difficultés d’endormissement dans cette période.
Qu’appelle-t-on les régressions du sommeil ?
Il existe plusieurs étapes qu’on appelle des régressions du sommeil. Ce sont des périodes de désorganisation et de dégradation assez importante du sommeil qui se manifestent par un changement de rythme pour l’enfant. Il dormait bien et tout d’un coup le coucher devient plus difficile, il multiplie les réveils nocturnes, les siestes sont plus courtes voire impossibles… Cette dégradation peut toucher à tout, on peut voir son enfant plus agacé, plus grognon, qui réclame davantage de présence et de câlins, qui devient plus fusionnel avec nous, et aussi (surtout à 4 mois) qui manifeste un appétit plus important (un biberon ou une tétée qui revient la nuit par exemple).
Comment s’expliquent-t-elles ?
Certaines régressions sont faciles à expliquer : en cas de maladie, de vaccin, de poussée dentaire, de changement de mode de garde ou tout autre élément perturbateur. Cela peut passer au bout de quelques jours. Dans ces moments nos enfants ont plus besoin de nous, de nos bras et de notre présence, et en tant que parents on sait mieux que personne ce qui les rassure.
D’autres régressions sont plus difficiles à expliquer pour les parents : ce sont les 5 régressions du sommeil physiologiques -donc normales-, liées au développement de l’enfant pendant les 24 premiers mois. Elles durent en moyenne entre 5 et 10 jours, mais peuvent se prolonger plus longtemps.
Je tiens à rassurer les parents : elles ne concernent pas tous les bébés et il est rare qu’un enfant vive les 5 régressions !
Comment réagir lorsque cela arrive ?
Ce qui est important c’est de se dire que ce n’est pas lié à ce qu’on fait ; si tout fonctionnait avant, il faut maintenir ses habitudes au maximum : rythme, rituel, etc. Ne rien modifier pour rassurer son enfant et si possible, ne pas intégrer de nouvelles habitudes (le prendre dans son lit si on ne le faisait pas ou plus par exemple).
La meilleure réaction sera d’être patient et à l’écoute de son enfant en sachant ce qu’il traverse ; être un peu plus avec lui en se disant que ça va passer ; plutôt adopter une attitude de soutien que de lutte.
Et si la phase de régression s’éternise ?
Si cela dure plus de 10-15 jours et qu’on est démuni, que rien ne fonctionne, si le fait de rassurer l’enfant n’améliore pas la situation : c’est alors peut-être signe que les habitudes doivent être changées. Peut-être que l’enfant a besoin que ça évolue. Enlever une sieste, modifier les horaires ou le rituel ?
À quel âge peuvent survenir ces 5 régressions du sommeil et quelle réponse apporter à chacune ?
1/ Autour de 4 mois
C’est la plus importante et souvent la plus difficile à vivre pour les parents : c’est le moment où l’on croyait avoir trouvé son rythme, où l’on reprend le travail, et tout d’un coup ce qui marchait ne fonctionne plus…
L’origine ? Cette régression est liée au fait que le bébé prend conscience de son environnement et du lien d’attachement avec ses parents. Il a tendance à refuser d’être posé, ne veut pas se séparer, pour dormir il a besoin d’un environnement plus calme, moins de bruit et moins de lumière.
Comment réagir ?
Avant 4 mois, la plupart des nouveau-nés s’endorment facilement et un peu partout. C’est autour de 4 mois que l’on peut poser les bases d’un rituel, commencer à créer les conditions pour en endormissement autonome, en évitant si possible les béquilles et les conditionnements en dehors du rituel du coucher.
C’est une phase charnière où les conditions vont être importantes pour son sommeil : plus d’obscurité (le noir total le soir, l’obscurité pour les siestes), moins de bruit, on cherchera à la rassurer et le câliner davantage durant cette période.
2/ Entre 7 et 9 mois
L’origine ? C’est le début de ce qu’on appelle angoisse de la séparation. L’enfant prend conscience que lui et sa figure d’attachement sont deux individus à part entière, il pense que lorsqu’on quitte la pièce, on ne va pas revenir.
C’est aussi une période de développement de l’autonomie du déplacement (il se retourne, fait des roulades, trouve la position assisse), et cela, comme toute nouvelle acquisition, peut expliquer une régression au niveau du sommeil, une régression qui dure plus longtemps que les autres.
Comment réagir ?
Notre enfant a besoin de nous et plus que jamais il faut le rassurer.
Quelques conseils :
– éviter, particulièrement dans cette période, de partir sans prévenir son enfant (même 5 min) : on est tenté de filer en douce, mais il est important de le prévenir même si c’est plus difficile à gérer.
– lui donner des points de repère qu’il peut comprendre avec une phrase courte : je reviens après ta sieste/ après ton goûter.
– jouer à cache-cache et « coucou-beuh » : pour qu’il commence à réaliser que même s’il ne le voit plus son parent revient.
– pour la personne qui le garde : prévoir des phases de transition, un petit temps avant de se quitter pour qu’il s’habitue et prenne ses repères.
3/ Autour de 12 mois
La troisième régression a lieu au moment de l’acquisition des premiers pas, donc la fenêtre peut être beaucoup plus large.
L’origine ? L’acquisition de la marche. Notre enfant a besoin de ressources en journée pour apprendre à marcher, ces ressources dégradent son sommeil de nuit. C’est une phase transitoire, il faudra attendre qu’il ait acquis cette motricité et soit à l’aise pour que ça disparaisse.
Comment réagir ?
Encore une fois, le rassurer, être là. Et l’aider, l’encourager en journée à marcher, à acquérir cela.
4/ 18 mois
L’origine ? Autour de 18 mois, c’est le développement de la personnalité et du langage qui peuvent perturber le sommeil de notre enfant. À cela s’ajoute une apogée de l’angoisse de la séparation. Comme entre 7 et 9 mois, elle se traduit par des pleurs quand on quitte la pièce, la peur de se séparer de nous. C’est un âge charnière où notre enfant se met à dire non, à exprimer sa volonté, sa colère. Sa personnalité s’affirme le plus souvent avec sa figure d’attachement principale, ce qui explique qu’on ait parfois aucun problème à la crèche ou chez les grands-parents…
Comment réagir ?
- – Notre enfant grandit, on peut lui expliquer qu’on part au travail, pourquoi on va chez la nounou, on évite de partir en douce. On prend l’habitude de se dire au revoir, un bisou, un câlin, à ce soir, à demain… On cherche à expliquer avec ses points de repère à lui.
- – Garder à l’esprit que c’est avec sa figure d’attachement qu’il relâche ses émotions de la journée, qu’il s’autorise à décharger.
- – La routine du coucher prend encore plus d’importance : le doudou (ou autre objet de transition), la tétine, les objets qui rassurent… On maintient toujours ce même rituel de coucher qui marche.
5/ 2 ans (parfois 3 ans)
L’origine ? Autour de 2-3 ans, le sommeil peut être perturbé par l’acquisition de la propreté et/ou la phase du NON : l’enfant développe sa personnalité et dit non à tout, y compris au sommeil. Ce n’est pas pour autant un caprice, il exprime ses émotions qu’il a du mal à maîtriser.
Comment réagir ?
Il s’agit de commencer àfaire la part des choses entre le réel besoin et l’envie. Soyez doux mais ferme. L’envie de jouer encore : c’est non. L’envie de rester avec maman ou papa : il faut trouver un juste milieu entre rassurer, être présent, mais ne pas recréer de conditions au sommeil et de nouveaux rituels (lit parental, biberon…) : par exemple rester un peu à côté mais le laisser dans son lit.
Évidemment on fait ce qu’on peut ! Il est important de se dire que c’est une phase, elle va passer, et de remettre en place les bonnes habitudes et les bons rituels dès que possible.
Nota bene : Heureusement les régressions du sommeil ne concernent pas tous les enfants, certains n’en ont aucune ! Ces repères peuvent nous aider à mieux comprendre ces phases et à être patient ; ils nous montrent surtout le côté positif, cela prouve que notre enfant grandit !
Si vous souhaitez en savoir plus sur les accompagnements du sommeil du bébé et de l’enfant proposés par Marie, rendez-vous sur son site : mamaandyou.com
Crédit photo : AJ Watt
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